OUI, LA VITESSE TUE !

 

Article original par Jean-Louis Rallu : de l'Institut national d'études démographiquesScience et Vie, n°888 (Septembre 1991) (suivre le lien)
Critique de texte par
Finn Bo Jørgensen

Ceci est un extrait d'un message copié sur le forum fr.misc.securite.routiere

Ca y est, on y a eu droit et je suppose que ce ramassis de lieux communs et de statistiques déformées sera posté à intervalle régulier, vu que c'est le seul texte existant qui va dans ce sens.

Le texte en question est basé sur une exploitation frauduleuse de statistiques basés sur des nombres très faibles et tout le raisonnement est basé sur des lieux communs avancés avec un aplomb qui fait peur.

Je me demandes comment Science et Vie a pu se planter au point de publier un tel ramassis de non sens et j'espère profondement que cet "article" ne reflète pas le point de vue de ce magazine. On peut supposer qu'il s'agit plutôt de la moitié d'un débat contradictoire entre deux personnes, mais, dans ce cas, il aurait fallu poster l'autre partie.

|> Les limitations de vitesse n'ont pas du tout les vertus que
|> leur prêtent les pouvoirs publics : l'étude des statistiques
|> indique, bien au contraire, qu'elles sont plus dangereuses
|> que les excès de vitesse.

Quelle étude ? Celle faite par des milliers de spécialistes qui passent des années à les analyser ou un parfait inconnu qui bosse dans un institut d'études démographiques ? Il est d'ailleurs intéressant de garder ce "raisonnement" en mémoire pour le comparer avec ce qui sera dit plus loin à propos de l'Allemagne.

|> Si l'on s'obstine à les maintenir, on ne descendra pas
|> au-dessous du seuil tragique de 10000 morts et de dizaines
|> de milliers de blessés par an.

Ah ? C'est pourtant ce qui s'est passé, mais bon, il le dit avec tellement d'aplomb qu'il faut le croire malgré les faits... :-)

|> Les spécialistes le savent.

Mais c'est bien sûr ! Ils les maintiennent pour avoir encore plus de cadavres pour faire leurs études...

|> 400 tués par million de véhicules, soit le double de la Suède.

Ce qui veut dire qu'en Suède, on doit tourner autour de 600 tués par an. (On va revenir la-dessus...)

|> Il est donc trop facile d'interpréter les statistiques dans le
|> sens voulu,

Tout à fait ! L'auteur de l'article ne s'en prive pas.

|> Pour cela, ils ont les moyens - et sont seuls à les avoir -

Ah bon ? Est-ce que ça veut dire que l'auteur avoue ne pas disposer de tous les renseignements et qu'il tire ses conclusions de sa propre opinion ?

|> d'établir une corrélation entre les causes des accidents
|> et les catégories d'usagers impliqués.

Et ils tirent quelle conclusion ? Que la vitesse élevée doit, en tant que facteur aggravant, être éliminée.

|> Ils ont à la fois les éléments d'analyse et accès aux fichiers
|> des assureurs.

Et ils tirent la conclusion contraire des adeptes de la vitesse... C'est rageant !

|> S'ils s'en donnaient la peine, on s'apercevrait que la loi est
|> faite surtout pour protéger le conducteur du dimanche des risques
|> d'accident qu'il est susceptible de provoquer lui-même.

C'est vrai que ces criminels ne font même pas l'effort de chercher à comprendre. Heureusement qu'il y a Louis Rallu pour les mettre sur la bonne voie ! (à part ça, la phrase n'a même pas de sens : "s'ils se donnaient la peine, on s'apercevrait...." ne veut absolument rien dire. Qui se donne de la peine ? Qui s'aperçoit ?)

|> Heureusement, il existe quelques bilans qui permettent d'infirmer
|> les thèses officielles.

"quelques bilans" ?

Habituellement, quand on a une masse de renseignements tel que c'est décrit ci-dessus qui indique quelque chose, il ne suffit pas de quelques bilans pour infirmer. En tant que scientifique, je sais comment on procède. Si 95 % des expériences donnent un résultat et les 5 % restants donnent le résultat contraire, on estime que
les 5 % représente la marge d'erreur. Pour M. Rallu, ce sont ces "quelques bilans" qu'il faut croire... du délire !

|> Cette contradiction et ce flou

Quelle contradiction ? Quel flou ?

|> incitent déjà à recueillir avec réserve les assertions
|> officielles.

Seulement si la thèse de départ est que la vitesse ne change rien. Ce n'est flou que si on cherche à prouver le contraire.

|> Celles-ci attribuent à la vitesse, comme à l'alcool, la
|> responsabilité de 30% des accidents graves, selon la Sécurité
|> routière, et de presque 50% pour le ministère des Transports.
|> Qui croire ?

Les deux ! L'écart vient du fait qu'un accident est le résultat de plusieurs facteurs, dont la vitesse prend une place prépondérante.

|> Tout se passe comme si la responsabilité de la vitesse était
|> considérablement et artificiellement majorée.

Ah bon ? Il faudrait peut-être étayer cette hypothèse.

|> Le premier argument en faveur de la limitation de vitesse est
|> que, chaque fois que la limite maximale a été abaissée, la
|> sécurité aurait progressé. Ce lien de cause à effet perd de
|> son évidence quand on sait que la décrue de l'hécatombe
|> routière s'était amorcée un an avant les toutes premières
|> limitations générales, appliquées en juillet 1973 sur
|> l'ensemble du territoire.

Je ne sais pas ou M. Rallu a appris à raisonner, mais là, ça frise le ridicule !

Personne n'a prétendu que la limitation était la seule cause de la baisse. Si on a rendu obligatoire le port de la ceinture (par ailleurs longtemps contesté comme élément de sécurité), c'était - évidemment - parce qu'on était certain que ça allait sauver des vies. Sinon, pourquoi obliger les gens ?

Rallu essaie de nous faire admettre que le fait d'avoir rendu obligatoire la ceinture de sécurité en 73 fait que, depuis, le nombre de tués baisse de façon relativement constante et que la limitation de la vitesse et la répression n'a rien à voir dans la baisse. C'est un peu gros, tout de même...

|> Cette amélioration provient aussi, mais à un moindre degré,

pourquoi "à un moindre degré" ? Hypothèse ou fait prouvé ?

|> de l'impact positif qu'ont eu les limitations sur les conducteurs
|> à risque (1), dans la mesure ou le respect des 90 km/h sur route
|> et des 130 km/h sur autoroute atténue les conséquences des déficiences,
|> de la maladresse ou de l'inexpérience.

Donc, la solution sera d'éliminer tous les conducteurs lambda, Monsier tout-le-monde pour permettre à ceux qui s'imaginent des Schumacher en puissance de rouler tranquillement.

|> Car, cela est vrai, le risque pris par cette catégorie de
|> conducteurs peut avoir des conséquences beaucoup plus graves à
|> grande qu'à faible vitesse

Il y a donc pas mal de cas où la vitesse a une grande importance.

|> ces conducteurs ne sont pas difficiles à repérer puisqu'il
|> suffit d'examiner le dossier assurances, pour autant qu'il soit
|> suivi.

C'est cela... il reste encore à prouver que les accidents mortels impliquent systématiquement des gens avec un malus chez l'assureur.

|> Quant aux voitures vétustes ou mal entretenues qui, aujourd'hui,
|> sont encore très nombreuses sur les routes, il suffirait, pour
|> s'en débarrasser, d'instaurer un contrôle technique périodique et
|> sérieux, avec obligation de réparer pour que le véhicule soit
|> autorisé à circuler.

C'est ce qui est fait maintenant et tout le monde critique le ministère en disant que cette mesure est destiné à ce que les constructeurs se mettent plein les poches.

|> Au lieu de cela, on a nivelé par le bas, pénalisant ainsi les
|> conducteurs confirmés, car on oublie trop souvent qu'il y en a,
|> et beaucoup.

|> Pour eux, la vitesse n'augmentait certes pas les risques.

Qui a prouvé ça ? J'adore le petit mot "certes" qui sert à dire "comme le sait tout le monde..." alors que ce postulat est loin d'être démontré.

|> En Allemagne, en 1985, une petite portion (6%) du réseau autoroutier
|> a été limitée à 100 km/h pendant un an, pour des études sur la pollution.
|> Les accidents graves ont alors chuté de 17% sur les tronçons limités,
|> certes. Toute déduction du rapport sécurité vitesse est annulée par
|> le fait que c'est exactement le taux d'amélioration qui a été enregistré
|> sur le réseau à vitesse libre.

Ca n'a pas aggravé le nombre, au moins, alors que c'est ce qui est dit au début dans cet "article" : "l'étude des statistiques indique, bien au contraire, qu'elles sont plus dangereuses que les excès de vitesse".

|> Conjoncture peut-être exceptionnelle ; les Allemands, cette année-là,
|> avaient peut-être moins roulé... ou bien étaient-ils particulièrement
|> inspirés par la prudence. Toujours est-il que les chiffres sont là.

Les chiffres sont la, justement pour montrer que, d'une année à l'autre, on peut avoir des fluctuations inexpliquées. En plus, le nombre d'accidents qui sont arrivés sur ces 6% du réseau est probablement trop faible pour qu'on puisse en tirer le moindre renseignement.

|> Cet exemple est d'autant plus frappant qu'il semble contradictoire
|> avec le suivant.

Cet exemple n'est pas frappant du tout et il n'est nullement contradictoire avec le suivant, bien au contraire. Les deux montrent exactement la même chose.

|> En Suède, au début de l'été 1989, la vitesse plafond a été ramenée de
|> 110 à 90 km/h sur les autoroutes. Résultat : le nombre de morts a plus
|> que doublé par rapport à la même période de 1988. Explication la plus
|> vraisemblable : la proportion de bons conducteurs dans ce pays doit
|> être très importante, ce qui est d'ailleurs confirmé par les
|> statistiques générales européennes, et, en conséquence, la gêne
|> occasionnée à ces conducteurs par la limitation a été plus forte que
|> l'impact positif sur les conducteurs à risque.

Bon, on va reprendre ça dans l'ordre, car cet exemple constitue un parfait exemple d'utilisation malhonnête de résultats statistiques.

Rallu omet judicieusement de nous donner des informations fondamentales : durée de cette étude et nombre de morts, notamment. On a vu plus haut que la Suède tourne à environ 600 tués par an. Il est facile pour Rallu d'induire le lecteur en erreur dans la mesure ou peu de Français connaissent réellement la nature du réseau routier suédois. En fait, contrairement à l'Allemagne, il y à tres peu d'autoroutes en Suède et on peut supposer que le nombre de tués sur celles-ci se chiffre à une
dizaine par an ou une valeur proche (Rallu ne dit rien la-dessus, ce qui rend son argumentation totalement infondé). Si l'étude a duré un mois, cela veut dire que le doublement dont il est question revient à passer de 1 à 2 tués, ce qui n'est guère concluant. Si ça a duré six mois, on passe de 6 à 12, ce qui n'est guère plus convainquant. Globalement, Rallu balance quelques vagues rumeurs en pature et prétend pouvoir en tirer une quelconque conclusion. C'est parfaitement malhonnête et montre bien son état d'esprit. Le fait que cet "article" soit repris par tous les fanas de la vitesse n'est guère reluisant.

Rallu balaye du revers de la main d'autres études qui tendent à montrer le danger de la vitesse élevée sans vraiment prouver quoi que ce soit.

Je passe un peu plus loin, faute de temps...

|> Et l'amélioration du bilan en 1974 est due essentiellement, on l'a vu,

"on l'a vu" ! Comment ça, on l'a vu ? "On" n'a rien vu du tout ! Rallu a prétendu que la ceinture avait plus d'impact que la limitation de la vitesse, mais sans apporter le moindre élément de preuve. Maintenant qu'on a un peu oublié que tout ça n'était que supposition, il nous en rement une couche, avec son "on l'a vu".

Astucieux, mais parfaitement malhonnête !

|> au port de la ceinture et, dans une moindre mesure, à l'impact
|> positif des limitations sur les conducteurs à risque

|> Force est donc de constater que la répression de la vitesse n'a pas
|> l'effet que prétendent les pouvoirs publics.

Nouvel effet de style : "force est de constater" alors que, pour l'instant on n'a rien constaté du tout. Rallu émet des suppositions basées sur du vent et, vingt lignes plus loin, ça devient des constatations...

C'est consternant et grossier comme procédé !

|> Comment en serait-il autrement quand cette répression s'exerce la
|> plupart du temps en des lieux ou la vitesse n'est pas dangereuse :
|> descentes, zones droites et dégagées (mais cinémomètre masqué par
|> une pile de pont !) ?

Encore des suppositions sans la moindre tentative de preuve.

|> La découverte d'un radar peut aussi entraîner une perturbation du
|> trafic par des freinages intempestifs ;

On dit tout et son contraire ! Il vient de critiquer que les radars étaient masqués par une pile de pont et, deux lignes plus tard, il sous-entend que c'est mieux pour la sécurité que les radars ne se voient pas. C'est vraiment n'importe quoi !

|> En revanche, la prévention contre l'alcool aurait une tout autre portée
|> en matière de sécurité routière.

Certes, mais difficile à mettre en oeuvre. Un test d'alcoolémie nécessite d'arrêter l'automobiliste et s'il y a un mec bourré sur cent, on va embêter 99 % personnes pour un "butin" assez maigre. En contrôlant la vitesse, on n'embête que ceux qui s'octroient le droit de bafouer la loi. En plus, rien n'empèche de faire les deux en parallèle.

|> Sauf s'il s'agit de quelqu'un d'exceptionnel, chez lequel les
|> automatismes sont très puissants, un conducteur qui a bu va, non
|> seulement enfreindre les règles élémentaires du Code de la
|> route (conduite à gauche, non-respect des priorités et de la
|> signalisation en particulier), mais il aura aussi tendance à
|> rouler vite, voire très vite,

Si je comprends bien, pour choper les ivrognes, une bonne méthode consiste à contrôler la vitesse et arrêter ceux qui roulent vite. Fallait y penser ! Les radars ont donc l'effet de bord bénéfique de faciliter la chasse aux conducteurs ivres !

|> quand un chauffard ivre provoque un accident à vitesse élevée,
|> il est malhonnête de considérer la vitesse comme l'une des causes de
|> l'accident ; elle n'est que la conséquence de l'état d'ébriété.

Certes, mais si le mec avait roulé moins vite, il aurait peut-être pu éviter son accident et celle-ci aurait été moins grave.

|>  PLUS ON ROULE VITE, MOINS CA CASSE !

Raisonnement odieux !

|> Excès de vitesse et nombre d'accidents, sur l'ensemble des routes, ne
|> sont pas du tout corrélés ; dans les 2/3 des cas, ils varient même en
|> sens opposés.

Comme l'a dit Rallu par ailleurs, le nombre d'accidents baisse en partie à cause de l'amélioration de l'infrastructure et l'amélioration (active et passive) des voitures (ABS, airbags, tenue de route,...). Il est, par conséquent, heureux que le nombre d'accidents baisse, malgré l'augmentation de la vitesse moyenne. Personne ne prétend que la vitesse élevée est l'unique cause d'accident, seulement que si on pouvait faire raisonner les quelques individus qui continuent à s'imaginer que ça fait sportif et masculin de foncer comme un malade, on pourrait sauver encore des milliers de vies.

Bon, je vais arrêter la, faute de temps et vu le nombre (plus de 500 en deux jours) de messages dans ce groupe, je crains fort ne pas pouvoir participer comme j'aurais aimé.